Rencontres au pas de charge de la société civile, des syndicats et des politiques : des actions de communication qui témoignent d’un manque de stratégie en la matière

Après avoir fait organiser un méga meeting avec, comme qui dirait, une mobilisation recto verso présidé par lui-même le samedi 29 avril 2023 à l’occasion de la cérémonie d’ouverture de la Semaine nationale de la culture (SNC) à Bobo-Dioulasso, le président de la transition et chef de l’Etat le capitaine Ibrahim Traoré s’en est retourné à Ouagadougou avec un plein d’énergie et de force. En effet, le stade Sangoulé-Aboubacar-Lamizana de l’accueillante ville de Sya, pour l’occasion, a vibré grâce aux artistes, au public, à la musique ; surtout que l’infrastructure qui a une capacité de quarante mille (40 000) places assises était remplie comme un œuf. Le chef de l’Etat qui ne s’est pas privé de s’offrir un bain de foule comme s’il était en campagne électorale ; et si on y ajoute, par exemple, son show lors du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (FESPACO) organisé du 25 février au 04 mars 2023, son discours du 23 mars à Kaya (Sanmatenga) et le fait que le Conseil des ministres s’est tenu à Bobo-Dioulasso la semaine dernière, tout porte à croire qu’il se projette dans l’après-transition et compte continuer à jouer un rôle politique de premier plan dans ce pays malgré ce que disposent les textes qui régissent la conduite de la transition et qui encadrent l’avenir politique de ses acteurs.

Qu’à cela ne tienne ! Pour le moment, ce n’est pas là la préoccupation principale. Ainsi, le capitaine Traoré est donc retourné à Ouagadougou et est en train de refaire face aux dures réalités de la gouvernance du Burkina : suites du massacre de Karma (100 à 147 morts selon les sources) avec une flopée de réactions, locales, nationales, sous-régionales, régionales et internationales dont certaines pointent clairement du doigt la responsabilité et la culpabilité des forces de défense et de sécurité (FDS) dans cette cruauté. On peut également imaginer qu’au sein de la Grande Muette, le silence est suffisamment bruyant et les points de vue évidemment variés d’un corps à un autre et d’un individu à l’autre à l’image de notre société dans laquelle les citoyens n’ont pas la même appréciation de la situation ; étant donné que ce qui défraie la chronique dans la cité le fait aussi au sein de l’armée qui est une composante de cette société. Et l’attaque subie par le détachement des FDS à Ougarou dans la Gnagna vient compliquer, avec ses trente-trois (33) morts, la tâche du capitaine président dont le gouvernement observe de plus en plus un silence radio total sur les pertes enregistrées par les forces amies et réagit « en différé » sur les incidents.

Qu’au regard d’un tel contexte, le gouvernement se décide à communiquer est une action pertinente car nombre de Burkinabè sont sidérés par cette situation et même que les partisans inconditionnels du capitaine président, manquent souvent d’arguments pour défendre leur champion et versent simplement dans des injures et des menaces (même de mort) à l’endroit de leurs vis-à-vis sur les réseaux sociaux et les médias sociaux. Les rencontres avec les organisations de la société civile (pas les organisations de la société servile), les syndicats et les partis politiques s’imposaient.

Cependant, sous réserve qu’un sondage d’opinion vienne démentir nos propos, il est permis de douter de l’efficacité de ces actions de communication car :

  • A part les aspects du contenu de l’intervention du ministre de la Défense et des anciens Combattants le colonel-major Kassoum Coulibaly sur la violation de l’espace aérien burkinabè et de la tentative d’attentat à la voiture piégée qui a été déjouée, il n’y avait rien de neuf sous le soleil. D’ailleurs, concernant ces informations, bien de personnes sont demeurées dubitatives ;
  • Les Burkinabè ont eu tellement le temps de « se gaver » qui d’infos, qui d’infox, qui d’intox et qui de fakes news que la parole gouvernementale n’avait plus grand effet ;
  • On n’a pas l’impression qu’en dépit de l’artillerie lourde (suivez notre regard !) en matière d’expertise en communication (médias traditionnels, réseaux sociaux, médias sociaux, informatique, etc.) que possèdent le MPSR2 et le gouvernement, ces rencontres sont parties intégrantes d’une stratégie de communication savamment élaborée, prévoyant des situations de ce type et méthodiquement mise en œuvre ;
  • Le caractère précipité des rencontres, les canaux utilisés pour leur convocation et les plaintes entendues ici et là en donnent sinon les preuves du moins les indices.

Pour notre bien à tous, le gouvernement doit éviter de naviguer à vue, surtout dans le domaine de la communication parce que, comme ses stratèges le savent, gagner la bataille de la communication sur la base des faits et de la vérité au sein de l’opinion publique rendra moins difficile la mobilisation générale en cours.

Sévérin OUEDRAOGO

Wendmanegre

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