Ceci est une déclaration parvenue à notre rédaction. Elle est de Harouna Dicko, un citoyen burkinabè et politologue.
Mes observations sur les projets de réformes politiques en cours
Le Burkina Faso appartient à tous les Burkinabè sans distinction aucune. C’est pourquoi je me permets un petit rappel sur la marche de notre République afin que de là où nous sommes, nous sachons d’où nous venons, pour pouvoir sereinement décider ensemble où nous voulons aller, et comment y arriver.
Depuis la Délibération n° 223-AT-58 du 11 décembre 1958 portant proclamation de la République de Haute-Volta devenue le Burkina Faso par l’Ordonnance n° 84-043/CNR/PRESS du 02 août 1984, notre pays compte quatre Présidents de la République ou Présidents du Faso selon l’appellation consacrée par la Constitution de juin 1991. Ce sont :
- Maurice YAMEOGO :
- Il est devenu Chef de l’Etat par la loi n° 2-59-ATL du 29 janvier 1959.
- Il fait écrire la 1ère Constitution du pays qui est adoptée le 15 mars 1959, fait élire une Assemblée Législative le 19 avril 1959 pour se faire confirmer Chef de l’Etat le 25 avril 1959, avant de se faire élire au suffrage indirect comme le Premier Président de la République le 11 décembre 1959.
- Après l’adoption par le Parlement Français de la loi n° 60-735 du 28 juillet 1960 portant approbation de l’accession de la République de Haute Volta à la souveraineté internationale et à l’indépendance, le Président Maurice en fait la proclamation le 05 août 1960, fait écrire et adopter la 2ème Constitution du pays le 27 novembre 1960 pour se faire élire encore au suffrage indirect comme Président de la République le 08 décembre 1960.
- Il est réélu au suffrage universel direct comme Président de la République le 03 octobre 1965.
- Il est renversé le 03 janvier 1966 après 06 ans, 11 mois et 05 jours de règne.
- 2- Sangoulé LAMIZANA : ;
- Il est devenu Chef de l’Etat par le coup d’Etat du 03 janvier 1966.
- Il fait écrire et adopter la 3ème Constitution du pays par le référendum du 14 juin 1970. L’article 108.1 de cette constitution le désignait lui, le militaire le plus ancien dans le grade le plus élevé, comme Président de la République.
- Il fait écrire et adopter la 4ème Constitution du pays par le référendum du 27 novembre 1977 pour se faire réélire au suffrage universel direct comme Président de la République le 28 mai 1978.
- Il est renversé le 25 novembre 1980 après 14 ans, 10 mois et 22 jours de règne
- 3- Blaise COMPAORE :
- Il est devenu Chef de l’Etat par le coup d’Etat du 15 octobre 1987.
- Il fait écrire et adopter la 5ème Constitution du pays par le référendum du 02 juin 1991 pour se faire élire quatre fois successivement au suffrage universel direct comme Président de la République le 1er décembre 1991, le 15 novembre 1998, le 13 novembre 2005 et le 21 novembre 2010
- Il est contraint à la démission le 31 octobre 2014 après 27 ans et 16 jours de règne.
- 4- Roch KABORE :
- Il est directement élu comme Président de la République au suffrage universel le 29 novembre 2015.
- Il a pris fonction le 29 décembre 2015 pour être réélu au suffrage restreint le 22 novembre 2020.
- Il est contraint à la démission le 24 janvier 2022 après 06 ans et 26 jours de règne.
Les trois premiers ont bénéficié chacun de l’avantage d’être déjà Chef de l’Etat en place pour se faire élire la 1ère fois sur la base des constitutions qu’ils ont eux-mêmes fait écrire et adopter.
Quant au quatrième, il a bénéficié du soutien actif de toutes les autorités de la « transition exclusive de 2014-2015 » pour être élu la 1ère fois. Mais dès son 1er mandat, il a fait écrire une nouvelle Constitution avec des velléités de la faire adopter au cours de son 2ème mandat.
Depuis son coup d’Etat le 30 septembre 2022, le Chef de l’Etat actuel a muselé les partis politiques et les OSC au seul profit de ses thuriféraires. Cela est du déjà-vu au Faso.
Mais, lorsqu’il se mure dans la dynamique volontariste de faire adopter de nouveaux textes législatifs de portée hautement politique tel que le code électoral, le régime juridique des partis politiques et la Constitution, cela est une manière de préparer lui aussi son élection comme Président de la République.
A l’évidence, même s’il parvenait à se faire élire dans ces conditions, il sera tôt ou tard contraint au départ, car aucun des quatre Présidents n’a pu transmettre le témoin à un successeur élu, parce qu’ils ont tous été élus la 1ère fois dans des conditions démocratiquement peu accommodantes.
Comme il avait lui-même promis le 1er octobre 2022 sur VOA avant de transformer cette promesse en souhait le lendemain 02 octobre 2022 sur RFI, j’estime que pour engager des réformes crédibles en vue de l’enracinement des valeurs de la démocratie et de la république, le Chef de l’Etat devrait d’abord terminer sa mission première qui est la reconquête du territoire national d’ici octobre 2023, avant qu’ensemble nous ouvrions une vraie transition pour faire des réformes politiques consensuelles afin de mieux baliser notre vivre-ensemble, car :
– la Constitution étant la norme supérieure par rapport à laquelle s’effectue le contrôle de conformité des lois, du point de vue de la hiérarchie des normes il est mieux de réviser ou adopter une nouvelle constitution consensuelle avant l’adoption des textes sur le code électoral et le régime juridique des partis politiques ;
– la Constitution étant la structure qui a pour objet, la liberté, et qui définit les principes fondamentaux de l’Etat de droit, du point de vue de la doctrine politique il est mieux d’éviter que des militaires fixent encore des règles du jeu politique qui seront préjudiciables à notre démocratie en construction.
« Ne m’en voulez pas »
Harouna DICKO Citoyen Burkinabè Ouagadougou, le 18 juin 2023
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