Campagne de dénigrement contre des journalistes burkinabè et français : Harouna Douamba serait à l’origine

Selon le rapport du reporter sans frontière, un réseau de médias factices a déclenché une campagne de dénigrement à l’encontre de deux journalistes françaises expulsées du pays et trois de leurs confrères burkinabè. Reporters sans frontières (RSF) dénonce des procédés de désinformation usités pour intimider des professionnels au service d’une information fiable et libre.

 

Depuis un certain temps on note un accru de tentatives de musellement des médias indépendants au Burkina Faso. Dernier exemple en date : la campagne de dénigrement organisée par un réseau de médias inexacts et visant nommément les journalistes françaises Agnès Faivre et Sophie Douce, récemment expulsées du pays, et leurs confrères burkinabés Hyacinthe Sanou, Lamine Traoré et Boukary Ouoba.

Une campagne orchestrée par plusieurs sites d’information affiliés au Groupe panafricain pour le commerce et l’investissement (GPCI) et lancée quelques jours après la publication, le 27 mars, d’une enquête de Libération sur l’assassinat d’enfants et adolescents dans le nord du Burkina Faso, dans lequel des membres de l’armée seraient impliqués.

L’apparition de contenus dénigrant, avec des motifs fallacieux, des journalistes locaux et étrangers confirme le recul, semaine après semaine, de la liberté d’informer au Burkina Faso. Cette campagne qui cherche à discréditer et intimider les voix libres menace le travail et la sécurité des journalistes ciblés et de tous les professionnels de l’information. Les autorités doivent les protéger et participer à la lutte contre la désinformation afin que les journalistes puissent exercer leur métier sans risque de représailles, peut-on lire dans le rapport.

Libération et Le Monde concernés par cette campagne de désinformation

Pour jeter le discrédit sur le travail mené par Libération une vidéo de deux minutes publié le 1er avril par le média en ligne créé de toute pièce par le GPCI, Wadjey’s TV, a fait le tour des réseaux sociaux. Il accuse les autorités françaises et l’Institut de recherche pour le développement (IRD), accusés d’avoir fourni aux journalistes “de fortes sommes d’argent censées payer des leaders de la communauté peule pour faire de faux témoignages”. Le soir même, Agnès Faivre apprend son expulsion du territoire sous vingt-quatre heures. Sophie Douce, correspondante du Monde, recevra la même injonction le lendemain.

Mais avant même le 27 mars, date de la publication de l’enquête de Libération réalisée par Célian Macé, Alexandre Horn et Matteo Maillard, plusieurs sites de la toile GPCI discréditent ce quotidien français ainsi que Le Monde, les incriminant d’être “payés et recrutés par la France afin de déstabiliser le Burkina Faso” écrit CCB TV News sur sa page Facebook, relate netafrique citant un rapport de RSF.

Trois journalistes burkinabè pointés 

Dans cette logique de dénigrement les noms de trois journalistes burkinabè ont été cités dans des messages diffusés également via des groupes WhatsApp.  Lamine Traoré (Radio Oméga), Hyacinthe Sanou (Studio YafaFasoCheck) et Boukary Ouoba (Association des journalistes du Burkina) sont accusés de connivence avec les médias Libération et Le Monde“C’est la troisième fois en quelques mois que je fais l’objet d’intimidation ou de menaces, s’inquiète Lamine Traoré. J’ai dû arrêter de travailler pendant plusieurs jours”. Il déplore l’absence criante de condamnations de ces atteintes au droit d’informer de la part des autorités : “Nous avons eu très peu de soutien public. Certes, les organisations professionnelles ont publié un communiqué le 13 avril pour dénoncer les menaces à notre encontre mais personne n’a encore pris la parole de façon individuelle. Il n’y a eu ni communiqués ni messages du gouvernement concernant cette affaire”.

Harouna Douamba, un proche de Wagner aux manettes 

Selon une le journal Libération tous les sites identifiés ayant diffusé cette campagne de dénigrement sont affiliés au Groupe panafricain pour le commerce et l’investissement (GPCI). Un groupe qui est sous la direction de Harouna Douamba, un lobbyiste ivoirien. Ce groupe est connu pour verser dans le commerce d’influence et la désinformation, agissant principalement au Burkina Faso, au Mali, au Togo, au Maroc et en République centrafricaine. Si les pages du GPCI ont depuis été désactivées par Facebook, ses tentacules repoussent vite : des pages substituts ont déjà réapparu. De plus, les sites d’information affiliés au GPCI et ayant relayés les fausses informations sont toujours actifs.

On se rappelle que Harouna Douamba était celui qui était à l’origine de la création de l’association ANA (Aimons notre Afrique) en 2011, liée au réseau ANAcom, aussi à l’origine de plusieurs opérations médiatiques de désinformation et de dénigrement de la France et des institutions onusiennes principalement en République centrafricaine. Et ce, dans une optique identifiée de soutien au gouvernement en place et aux politiques d’influences pro-russes menées par le groupe paramilitaire russe Wagner, qui finance alors en partie ANAcom. Facebook a fini par interdire le groupe et ses 21 médias en ligne, selon All Eyes on Wagner.

Dans un rapport publié le 3 avril, RSF alertait sur la dégradation importante de la liberté de la presse au Sahel. Cette campagne de dénigrement et ces accusations mensongères diffusées massivement en ligne à l’encontre des journalistes illustrent les problématiques mises en lumière dans ce dossier.

La Rédaction

Wendmanegre

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