Burkina : « Faisons très attention pour ne pas déchirer le tissu social déjà fragile ! » dans la lutte contre le terrorisme selon Hamidou Sidibé porte-parole du chef traditionnel de la communauté peule du Grand Ouest

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Dans la lutte contre le terrorisme au Burkina, le porte-parole du chef traditionnel de la communauté peule interpelle le chef de l’Etat à travailler à ne pas déchirer le tissu social déjà fragile.

Libertébf : quel appréciation faites-vous de la tenue de la 20e édition de la Semaine nationale de la culture (SNC) ?

porte-parole-de-la-communauté-peule-ouestHamidou Sidibé : Si on analyse un peu la situation, d’aucuns diraient que ce n’est pas la SNC la préoccupation des Burkinabè parce qu’ils vivent une situation très difficile. Nous avons l’insécurité, nous avons nos forces de défense et de sécurité (FDS) qui sont harcelées et nous avons des communautés qui sont aussi harcelées par des terroristes les obligeant ainsi à se déplacer. De ce point de vue, on peut dire que la SNC n’est pas une préoccupation. Par contre si on le regarde sous un autre angle, et dire que la SNC peut apporter un début de solution à ces problèmes de cohésion, d’incompréhension entre communauté, elle en vaut la peine d’être tenue. Maintenant tout réside dans la façon de faire. Si c’est pour montrer notre culture, nos valeurs de tolérance, de pardon, et comment les Burkinabè doivent s’accepter, c’est une très bonne chose ; mais si c’est pour faire du folklore, remplir des stades recto verso je dirai que ce n’était pas utile. Tout compte fait la SNC est là, faisons-en sorte qu’elle soit utile pour nous tous. De ce point de vue, je crois qu’il faut privilégier certaines valeurs culturelles qui sont pour la tolérance, la cohésion sociale, et montrer comment les Burkinabè vivaient avant. Aussi il faut accepter que les autres aient une pensée contraire parce qu’il faut quitter dans le domaine « c’est moi ou rien ». On ne peut pas continuer à dire que le Burkina c’est pour tous les Burkinabè et venir tout seul ou en groupe s’arroger tous les droits et se dire qu’il n’y a que notre vision qui est la bonne. Il faut que cela change pour que les Burkinabè aillent ensemble affronter le terroriste. Mais si nous allons de façon diviser ça sera compliqué.

Libertébf : peut-on toujours parler de tolérance et du dialogue communautaire dans le contexte actuel du Burkina ?

Hamidou Sidibé : On peut dire qu’il en reste de la tolérance, et on peut toujours dialoguer mais il faut faire extrêmement attention à ce que nous faisons car tous ceux qui vivent sur le sol burkinabè veulent la paix, tout le monde est impacté négativement. De nombreux Burkinabè aujourd’hui souffrent parce qu’ils ont perdu au moins un parent dans cette guerre ou ils ont fui leur localité et se retrouver sans rien à manger ni où dormir. Nous devons travailler de façon à ramener tous les Burkinabè sur un seul chemin celui de la lutte contre le terrorisme mais si nous amenons les Burkinabè à se confronter entre eux ça sera catastrophique. L’objectif c’est de récupérer nos terres perdues et de vivre dans la paix. Mais si dans notre façon de faire nous provoquons des guerres civiles, à quoi ça va nous servir ? Nous avons peut-être les mêmes objectifs mais faisons attention à ne pas causer d’autres problèmes beaucoup plus graves et c’est là le fondement de mon inquiétude. Ce sont des aspects importants dont il faut que le président du Faso tienne compte. Son rôle premier c’est de rassembler les Burkinabè et aussi d’empêcher un quelconque affrontement entre eux, c’est ce que nous lui demandons. Allez à la guerre nous sommes tous d’accord, notre territoire nous n’allons pas le céder à quelqu’un. Nous voulons vivre dans ce Burkina, un Burkina de paix, de liberté et de démocratie. Nous refusons les terroristes aujourd’hui parce qu’ils sont des fascistes et ils tuent les gens. En plus des terroristes, toute personne qui va se comporter de la sorte et tuer des gens nous nous opposerons à cela. Nous devons vraiment faire très attention parce que nous avons un tissu social très fragile aujourd’hui et le président du Faso doit veiller à ce qu’il ne se déchire pas.

Libertébf : quel message avez-vous à l’endroit de la communauté peule en particulier et des Burkinabè en général

Hamidou Sidibé : Ce que je veux dire aux Burkinabè et particulièrement à la communauté peule, c’est que nous devons faire attention. Notre vivre-ensemble et la cohésion sociale sont très importants. Quelle que soit la situation nous devons savoir raison garder et nous dire que ce territoire appartient à tous. Ce n’est pas à cause des erreurs de quelques individus qu’il faut bruler sa maison. Nous demandons aussi aux Burkinabè qui sont de l’autre côté de comprendre que la prise des armes n’est pas la solution. S’il y a un problème nous devons accepter de nous asseoir entre Burkinabè pour en discuter. Ceux qui ont pris les armes contre leur propre Etat doivent les déposer. A l’ensemble des Burkinabè je dis que c’est ensemble que nous devons gagner cette guerre. Nous ne devons pas stigmatiser certaines communautés car la meilleure manière de perdre cette guerre c’est de nous diviser, d’aller en rang dispersé.

Interview réalisée par Wendmanegré OUEDRAOGO

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